Je vous supplie d'attendre la pluie avec moi


J’ai glissé.

Quand on glisse, il n’y a rien à s’accrocher.
Les autres vous regardent glisser.
Vous voyez dans leurs regards l’opportunité de grimper d’un étage.
Il y a une place à prendre.

Ils vous regardent glisser, retirent leurs mains.

Vous êtes un mot sur le bastingage, une lame vous emporte.
Vous tombez dans une rue où personne ne vous connait.
Même ceux qui vous connaissent ne savent plus vous reconnaitre.

Vous mourrez aux yeux de votre monde.

Mais vous ne pouvez pas vraiment mourrir, c’est viscéral, c’est malgré vous.

La vie, il faut la justifier.
On ne reste pas vivant si on pense qu’on est une merde ; que la merde vaut moins que rien.
Alors on se dit que même si la merde sent mauvais, elle a sa place dans le monde.
On revendique le droit d’être une merde.
On s’invente la valeur d’une merde.

Moi, je revendique mes habits sales, les odeurs de mon corps.
Je revendique le dégoût dans le regard des passants quand il tombe sur ce que je suis.
Je revendique le sommeil avec les chiens et les loups.
Je revendique une vie dans l'obscurité des villes